23/02/2013

Projet radio 6° : Questionner le sujet pour rédiger un article exhaustif

             Pour ou contre le questionnement du sujet ? Quelle est son utilité ?  Quel sens lui donner auprès des élèves ?
         Jusqu'ici, j'apprenais aux élèves à questionner leur sujet de recherche avant de se "jeter" sur un ordinateur ou sur un ouvrage documentaire : qui, quoi, où, quand, pourquoi, comment.
Cela leur prenait quelques minutes. Pour les élèves les plus en difficulté, cela leur rendait le travail encore plus "pénible" car ils avaient devant eux un premier obstacle : trouver des questions.
Cependant, cette étape avait pour moi plusieurs objectifs autres qu'info-documentaires :  faire un effort, réfléchir avant d'agir, ralentir le temps plutôt que de désirer l’instantanéité. Il me semble que c'est un moment où ils s'approprient le sujet, le "digèrent" pour mieux en dégager le sens et l'avoir en mémoire (un peu).

Avec la création de chroniques radio (projet radio 6°), cette étape qui me semblait jusqu'ici fastidieuse (et ennuyeuse j'avoue ...) m'est apparue fondamentale peut-être parce que, pour la première fois, j'ai obligé les élèves à avoir tout le temps leurs questions sous les yeux et à s'y référer en permanence durant leur recherche.
J'y ai moi-même trouvé un intérêt nouveau : le questionnement du sujet comme "chemin", les questions étant des "balises" qui permettent à l'élève de ne pas se perdre dans la recherche s'il suit ses balises/questions avec, au bout, un objectif simple : que le lecteur (ou auditeur) ait toutes les informations nécessaires pour comprendre le sujet traité.  En effet, lors de la séance 2, les élèves ont recherché la définition de "chronique radio" : article lu à voix haute. Leur premier travail, avant celui de l'oralité, est donc de rédiger un article écrit à partir d'informations recherchées. Or, Cet article doit être exhaustif, c'est à dire que l'information contenue doit permettre à quiconque de comprendre le sujet et ainsi de répondre à 5 questions : qui / quoi / où / quand / pourquoi. C'est la règle journalistique des "5W"...  qui, a une question près, correspond au questionnement quintilien.

Alors que le questionnement du sujet a nécessité mon aide, la recherche s'est faite en autonomie. Je n'intervenais que pour les motiver, tel un entraîneur de natation au bord du bassin lors d'une compétition ... parce qu'un ado se déconcentre facilement, parce que la recherche a été morcelée, parce que l'objectif semble loin pour certains.
Le questionnement du sujet leur a permis :
  • de définir leur besoin d'information
  • de dégager les mots-clés à utiliser pour effectuer une requête efficace dans google (un seul mot suffisait pour presque tous les sujets qui étaient simples)
  • de savoir quelle information leur manquait d'une séance à l'autre (la RI s'étant effectuée sur 2h minimum, certains groupes 3h) : suivre le besoin
  • d'affiner les mots-clés pour chercher l'information manquante
  • de vérifier l'exhaustivité de leur article fini.
  • de savoir quand s'arrêter de chercher l'information

Utilité du questionnement et progression de la réflexion des élèves sous forme de tableau (ex : une recherche sur un instrument de musique ; l'orgue) :



A lire également l'article Que faire des mots clés aujourd’hui ? de Frédéric Rabat, professeur documentaliste publié sur le site Docs pour Docs en 2008 : "Je crois plus sûrement à l’opportunité d’un questionnement qui prend en compte un projet d’écriture et de restitution. "

Projet radio 6°, séance 4 : de l'écrit à l'oral

                    Cette partie est liée à celle sur le travail de la voix du journaliste. Comment le journaliste fait-il pour varier le ton, faire des phrases courtes ...
Cette fiche-outil va leur permettre de modifier leur article rédigé en un article adapté à la lecture à voix haute.
Il s'agit de :
  • faire des phrases courtes
  • marquer la ponctuation orale pour les aider à respirer au bon moment (ce qui aide à mettre le ton)
  • faire une mise en page adaptée à la lecture orale

Je ne parle pas d'autres contraintes de l'écriture pour l'oral car ils ne sont qu'en 6° et leurs sujets de recherche ne justifiaient pas que je leur précise qu'il faut éviter le trop grand nombre de chiffres et de détails, préférer le présent et le passé composé (passé simple à éviter ! ).

pour info  :                          / = durée de la respiration courte                 // = longue
Ils souligneront les mots à accentuer lorsqu'ils s'entraîneront à lire à voix haute.


Bilan ?
Cette séance (analyse de la voix et passer de l'écrit à l'oral) est assez simple à condition que le site de France Inter soit accessible. A la fin d'une séance, un groupe a fini sa recherche 10' avant la fin de l'heure. J'ai voulu enchaîner avec la rubrique de France Inter mais le site n'était pas accessible à ce moment-là. C'est le problème des podcasts qu'on ne peut pas télécharger. On peut toujours les enregistrer via Audacity si la carte son de l'ordinateur le permet.
Les élèves ont "survolé" la séance, autant les bons élèves que ceux en difficulté. Pourtant, une chronique sur les zones humides n'a rien d'excitant ... C'est juste qu'on oublie que les élèves sont entourés d'images ET de sons.

Projet radio 6°, séance 4 : le travail de la voix du journaliste

                J'ai décidé d'aborder la chronique radio d'un point de vue journalistique et non pas de l'animation. Le travail de la voix est différent : l'animateur est souriant, jovial, agréable mais la chronique radio d'un animateur ne permet pas de mettre en évidence le rôle des mots-clés dans la lecture à voix haute, contrairement à une lecture plus "journalistique".

Les élèves ont donc fini de rédiger leur article qui devra ensuite être lu à haute voix (définition de la chronique radio trouvée lors de la séance 2 : "article lu à voix haute"). Le travail sur l'oralité commence maintenant.
L'objectif de cette séance est de comprendre le travail de la voix du journaliste et ses objectifs ... et donc les modifications qu'ils vont devoir réaliser sur leur article écrit.


               J'ai sélectionné une chronique radio de France Inter en podcast à écouter : la question du jour de Nathalie Fontrel sur les zones humides. Les élèves de 6° savent-ils ce que sont les zones humides ?  Non et tant mieux car le podcast en est plus intéressant ... vous allez voir pourquoi à la fin de la séance.

1) On écoute la chronique une fois en entier, sans papier sous les yeux.

2) Distribution de la fiche 6-10.
Projection au vidéo-projecteur de la page web correspondante au podcast : les élèves doivent trouver et préciser les informations suivantes :
  • Nom de la station radio  : France Inter
  • Titre de la chronique : la question du jour
  • Nom du journaliste : Nathalie Fontrl
  • Sujet traité : les zones humides
  • Durée : 1'30 (il faut lire le podcast pour avoir la durée affichée sur le player)
 3) Lecture ensemble des tableaux avec définition du ton et du débit. Je leur fais écrire des définitions avec leurs mots : ton = hauteur de la voix .... débit = vitesse, nombre de mots dits à la minute ...
On explique certains mots de vocabulaire comme "impliqué", "vocabulaire courant..."
4) Les élèves vont utiliser ces tableaux pour analyser la voix de la journaliste. On écoute plusieurs fois la moitié du podcast (l'écouter en entier à chaque fois n'est pas nécessaire) et les élèves cochent en autonomie en fonction de ce qu'ils entendent.
5) On fait le point ensemble sur ce qu'ils ont entendu. Très peu d'élèves ont coché autre chose que : 
  • la voix : normale, agréable, froide
  • ton : varié, impliqué
  • phrases : simples, courtes
  • mots : débit rapide, vocabulaire courant
6) On échange sur la voix, sur le fait qu'ils vont devoir faire pareil : parler ni trop fort, ni trop bas, ne pas sourire (contrairement à un animateur), avoir un ton nuancé, sentir qu'ils sont concernés par ce qu'ils disent ... A la question : "comment la journaliste fait-elle pour avoir un ton varié ?" Un élève répond toujours que c'est parce qu'elle accentue des mots, ce qui correspond à la 2ème partie de cette séance.
Faire des phrases courtes et simples  ...

7) Les mots accentués :

 On écoute le début du podcast qui correspond à ce texte. Les élèves soulignent les mots accentués au fur et à mesure de l'écoute. Ils me les dictent ensuite pour que je les écrive au tableau (en fait, la partie "je recopie ..." ne sert à rien ! ) . Je leur demande alors ce qu'ils remarquent lorsqu'ils lisent les mots à la suite ... 
eux : "on comprend le texte juste avec les mots" ... 
moi : "pourquoi ? "
eux : "ce sont des mots importants" ... "ce sont des mots-clés".
En effet, on peut reconstituer un texte juste avec quelques mots. C'est tout l'enjeu de l'accentuation des mots lors de la lecture à voix haute : aider l'auditeur à mémoriser un message rapidement. N'est-ce-pas ce que font les enseignants lorsqu'ils s'adressent aux élèves ?
Le mot-clé a alors un autre objectif que d'être utilisé dans Google ou le logiciel documentaire, il est d'un seul coup autre chose que la perpétuelle question "quels sont tes mots-clés ?" que la prof-doc pose lorsque l'élève est bloqué devant google au CDI. Le mot-clé devient une notion liée à un média, à une réalité quotidienne hors de l'espace et du temps scolaire.

Je leur explique alors qu'ils devront eux aussi accentuer les mots importants de leur texte lors de l'enregistrement.
Ce qui me permet de passer à la fiche 6-11 : de l'écrit à l'oral


             Pourquoi cela n'a-t-il aucune importance que les 6° ne connaissent rien aux zones humides ? Parce qu'une chronique radio doit être exhaustive. Elle doit permettre à l'auditeur de tout comprendre en peu de temps même si celui-ci n'y connaît rien.  Ce sont les "5W" du travail journalistique ... qui font bien sûr penser au questionnement quintilien qui aide les élèves à définir leur besoin d'information. Ce qui me permet de rédiger un autre billet à ce sujet.

16/02/2013

Le traitement de l'information en radio

              L'éducation aux médias fait souvent la part belle au traitement de l'information dans le journal télévisé ... mais il ne faut pas oublier la radio. Le journal ou le flash-infos est un moment stratégique de la programmation .

Une station de radio a 3 objectifs :
  • intéresser l'auditeur : garder le plus longtemps possible l'auditeur à l'écoute pour qu'il ne zappe pas.
  • fidéliser l'auditeur : qu'il revienne au plus vite écouter cette station
  • l'heure : que tous les sons soient diffusés au moment prévu
Pourquoi ?
Les sous ... je parle ici pour les radios qui ne sont pas des radios associatives (elles ne sont pas dépendantes du médiamétrie et donc du nombre d'auditeurs.)

Une radio (comme la télévision) est financée par la publicité qu'elle vend. Son argument de vente principal est le nombre d'auditeurs susceptibles d'entendre la publicité et de devenir ensuite acheteurs du produit. Afin de connaître ce "nombre d'auditeurs", la station de radio va commander une mesure quotidienne de son audience. De plus, les radios commerciales locales, en plus de la publicités locales qu'elle vend, sont financées par la diffusion de la publicité nationale. Un spot national est vendu x euros par auditeur.
Ainsi, les dirigeants sauront, tous les trimestres :  (126 000 radios)
  • L’audience moyenne d’une journée : nombre moyen d'auditeurs qui écoutent la radio
  • L’audience par tranche horaire : nombre moyen d'auditeurs qui écoutent la radio selon les émissions, les chroniques, les flashs-infos ... et de la même façon, quelle émission fonctionne, fait monter l'audience ou la fait baisser, quel animateur n'est pas apprécié des auditeurs (suite à un changement) ... les résultats sont donnés au quart d'heure près.
  • l’audience sur plus de 250 cibles (qui ont 13 ans minimum) : qui écoute ?
  • La part d’audience de leur station : comment se situe la station par rapport au paysage radiophonique national et donc par rapport à ses concurrents.
  • La durée d’écoute par auditeur : si la durée a diminué, c'est peut-être dû à un problème d'habillage antenne trop agressif, ou au changement de grille de programme ...
 
Cela va permettre de bien connaître les auditeurs et ce qu'ils aiment ou pas. Une fois que la demande est définie, il n'y a plus qu'à adapter, réajuster l'offre :
  • on modifie ou on garde le contenu : la programmation musicale, le choix des émissions (durée, contenu, qui anime ..) des chroniques, la ligne éditoriale pour le traitement de l'information dans les journaux (plus accès sur le local, plus de politique car ce sont les élections présidentielles, plus de reportages dans le sud de la France car ce sont les vacances d'été ...)
  • on modifie ou on garde le contenant : toute la mise en onde (tous les sons, musiques, jingles qui donnent la "couleur" de la radio)
 Cela va permettre
  • d’augmenter l’audience en gagnant de nouveaux auditeurs
  • d'augmenter la durée d'écoute des auditeurs

En ce qui concerne le traitement de l'information en radio, celui-ci va donc être adapté à la demande des auditeurs, à la cible :
  • le choix des sujets traités : marronniers, sujets en fonction des saisons, des calendriers politiques, des conjonctures économiques (comme la crise), de l'âge moyen des auditeurs (on parlera plus politique sur RTL que sur NRJ) et de leur catégorie socio-professionnelle.
  • la hiérarchisation de l'information : ex avec NRJ qui adapte sa hiérarchie à ses auditeurs : sujet 1 : la météo / dernier sujet : sortie d'un album, d'un film ...
  • un reportage, une interview pour des sujets d'actualité qui sont "vendeurs" ou qui intéressent les auditeurs (en ce moment, la viande de cheval dans les lasagnes ! )
  • la durée : court ou développé. Par exemple, le flash-infos dure 3' maximum sur NRJ afin que la durée ne rompt pas le "rythme d'écoute". Si vous avez une succession de sons de 3' à 4' chaque (chanson / chanson / teasing et pubs (promotion interne afin de garder l'auditeur à l'écoute mélangée à des spots publicitaires) / infos / 1 chanson  ... ), un rythme d'écoute se met en place. Le flash infos se fond dans ce rythme et permet de ne pas perdre beaucoup d'auditeurs. L'adolescent n'aime pas trop les informations mais si elles sont communiquées au milieu d'un flux de sons dont le rythme est constant, elles ne les feront pas zapper vers une autre station de radio.
  • les horaires de diffusion : les actualités sont diffusées à des moments clés de la journée où le maximum d'auditeurs peut écouter (médiamétrie : L’audience par tranche horaire) : pendant qu'ils mangent, qu'ils se déplacent (avant d'aller au travail le matin et le soir, lorsqu'il rentre chez lui le midi et le soir. Plus de la moitié du volume d'écoute est réalisée pendant les déplacements), qu'ils se lavent les dents ou qu'ils prennent la douche  ... C'est l'enjeu de la programmation : que tout soit diffuser au moment idéal d'écoute, au moment où l'auditeur est le plus apte à écouter ce qu'on lui dit : vers 7h30 et 18h. Ces horaires dépendent des résultats du médiamétrie de la station.
  • La mise en onde ou réalisation des flashs et des journaux (on peut d'ailleurs travailler sur chacun de ces points avec les élèves)
  1. la musique diffusée pendant que le journaliste donne les titres ("bed", "tapis sonore" ...) : rapide, lente, dans les aigus, dans les graves, rythme régulier ou pas ... Pourquoi ?
  2. les jingles ou virgules entre chaque sujet ou pour différencier les parties structurant le journal (titres / parties développées ou infos nationales / infos locales ...avec ou sans éléments verbaux ? ...) Pourquoi ?
  3. le travail de la voix du journaliste (vous remarquerez qu'il y a peu de voix de femmes en radio. En majorité, ce sont des journalistes)
  4. le choix des mots : dramatisation de certains sujets avec des phrases choc, un vocabulaire réfléchi pour accrocher l'auditeur
  5. la mise en scène des reportages (dès qu'il y a montage, il y a mise en scène. Les sons sont rarement montés dans l'ordre chronologique de leur enregistrement) : toujours demander aux élèves de se poser une question : pourquoi ? Quelle est son utilité? Pourquoi le reportage commence par ce son ? Pourquoi l'interview est à cet endroit du reportage ? Est-ce un complément d'information ? Une preuve ? Une redondance ? L'évènement est-il raconté sous forme de récit ? )

                 J'oublie certainement d'autres points. Un article de RFI propose une fiche sur les titres du journal. Vous trouverez également sur le site une multitude d'informations sur le travail des journalistes en radio, ou sur la création de chroniques ... et puis je vous rassure, le premier objectif d'un journal radio reste d'informer.
Néanmoins, la radio est moins dépendante de son audience que la télévision car les chaînes de télé connaissent leur audimat au quotidien. Les stations de radio ont toujours 3 mois d'attente pour voir si les modifications réalisées ont eu un impact sur leurs objectifs d'audience.

                   Le  traitement de l'information en radio est aussi passionnant qu'à la télévision car le montage est moins évident : le montage d'images se voit mais un montage son peut être "invisible". De plus, la radio, comme la télévision, doit faire preuve de stratégies constantes pour rester un média vivant. Elle doit innover, faire plus, faire différent à une époque où les jeunes écoutent la musique sur leur MP3 ou webradio. La concurrence n'est qu'à un clic de l'auto-radio, du téléphone portable, de l'ordinateur ... la mise à disposition de podcasts est devenue une nouvelle stratégie de fidélisation des auditeurs.
Et le plus incroyable est que la radio telle qu'on la connaît aujourd'hui dans sa diversité musicale et son offre d'informations n'existe que depuis 1981 ! C'est un média de masse plus jeune que la télévision.

08/02/2013

Le temps scolaire vs l'Education aux médias et à l'information : quel sens donner à un enseignement morcelé ?

                Avec des amies prof-docs (collèges et lycées professionnels) nous réfléchissons à la motivation des élèves : comment la faire naître, comment la faire durer dans le temps, comment créer le désir d'apprendre ?
C'est le but du projet radio en 6° dont je vous fais part, séance après séance : motiver les élèves en donnant du sens à leur recherche d'informations, apprendre à s'informer pour informer les autres.
             Or, je me heurte à un obstacle à la motivation que je n'avais pas prévu : le temps scolaire. La création de sens par la mise en projet n'est pas adaptée au temps scolaire ou inversement : le temps scolaire ne permet pas la motivation à long terme et un engagement continu de l'élève dans un projet.

          La recherche d'informations en 6° pour rédiger l'article qui deviendra ensuite chronique radio est longue, elle demande plus d'une heure et donc une certaine cohérence et continuité de réflexion, de concentration et aussi d'actes techniques (au niveau informatique et informationnel).
Une séance de 55' dure en fait 45' : faire l'appel, distribuer les documents, régler des petits problèmes de matériels, de codes ... déjà 10' de perdu. A la fin de l'heure, la cloche sonne ; c'est le cours de maths, de français ... qui les appellent et qui leur disent "rangez tout et allez vite à l'autre cours". L'élève referme son "tiroir mental" IRD  pour se préparer à ouvrir le "tiroir" maths. Les cours s'enchaînent, le week-end, la semaine, une autre semaine ...
Entre deux heures d'IRD, l'élève de 6° aura eu ... 50 heures de cours ! 

             Et voilà que c'est à nouveau l'heure de la recherche pour la radio. Nous perdons à nouveau des minutes avec l'appel, les absents .... les élèves se replongent dans leur carnet de bord, essaient de se souvenir où ils en étaient (dans les actes et leur réflexion). La motivation de l'élève n'est plus, il faut la refaire naître. Je me rends compte que je dois alors tout rappeler, leur redonner envie, les recentrer sur l'objectif final : la diffusion en radio. "Vous êtes comme des journalistes, vous cherchez pour informer les gens qui vont vous écouter ... Vous en êtes à la recherche d'informations afin de rédiger votre article qui sera ensuite lu à voix haute ... vous vous souvenez, on a cherché la définition de "chronique radio" (séance 2) ... il n'y a pas d'improvisation en radio, tout est écrit et c'est ce que vous faites ...".
               La chance que j'ai est que j'ai oublié (!!) de leur faire écouter des chroniques radio enregistrées par des élèves il y a quelques années. Cela me permet de leur remettre en tête (en séance 4) l'objectif final de la recherche et de leur permettre de comprendre concrètement ce qu'ils font et pourquoi ils le font. Cela leur permet de modéliser mentalement leur future chronique radio.


           Ce temps scolaire accordé aux Initiations à la Recherche Documentaire en 6° (et encore, j'ai beaucoup de chance car les IRD sont dans l'emploi du temps des élèves) et plus généralement à l'éducation aux médias et à l'information va à l'encontre de l'engagement demandé aux élèves, à cette motivation durable nécessaire à la participation active à un projet qui dépasse les 55' données. Il en est de même pour tous les projets que nous proposons aux collègues de discipline : il est sans cesse morcelé, émietté, évaporé dans le temps.
           Cependant, nous pouvons peut-être inventer une autre organisation du temps scolaire plus adaptée à notre "enseignement" (je mets des guillemets pour ne heurter personne) qui le rendrait plus efficace et moins dilué dans le temps. Après tout, pourquoi l'éducation aux médias et à l'information ne nécessiterait-elle que quelques heures par an ? Est-elle moins importante que les autres "enseignements" ? (sans rentrer dans le débat discipline / pas discipline).
           Pourquoi ne pas concentrer ces heures durant une période limitée : proposer des séances de 2h pendant le 1er trimestre (une semaine sur deux) puis proposer de revenir à une heure de séance (une semaine sur deux) en remplaçant l'heure libérée par de l'aide aux devoirs ou de l'accompagnement éducatif ? ... Surtout que ces dispositifs débutent souvent après les vacances de la Toussaint. Ainsi, dès le début de l'année, cette organisation particulière peut être prise en compte dans l'emploi du temps des élèves et modifiée ensuite au second trimestre. J'y réfléchis ... notamment pour ce genre de projet d'éducation aux médias. (mais j'imagine déjà les chefs d'établissement s'arracher les cheveux lors de la création des emplois du temps à la rentrée).

              J'enseigne à des élèves des connaissances et compétences que les collègues de discipline leur demande de mettre en pratique dès la rentrée lorsqu'ils leur demandent de faire une biographie, une recherche d'image, des recherches sur le web ... la contradiction est évidente. J'aborde la recherche sur le web après les vacances de la Toussaint, ce qui représente deux mois de cours pour un élève, 24 séances en histoire-géographie,  12 h en technologie, 32 h de sport et ... 4 séances en IRD !
               Heureusement que la motivation des élèves n'est pas proportionnelle à la répartition mensuelle des heures par "discipline" ...


Pour aller plus loin sur le temps scolaire un article de Agnès Cavet  dans Veille et Analyses (numéro 60, février 2011) Rythmes scolaires : pour une dynamique nouvelle des temps éducatifs )

03/02/2013

Compétences en littératie médiatique mobilisées lors de la création d'une chronique radio

           On en parle, on le cite ... Pierre Fastrez, chercheur qualifié FNRS (Fonds de la Recherche Scientifique) à l’UCL (Université Catholique de Louvain) est intervenu au séminaire du Groupe de Recherche sur la Culture et la Didactique de l’information (GRCDI) en septembre 2012. Son intervention "Translittératie et compétences médiatiques "  présente le concept de littératie médiatique qu'il distingue de la translittératie.
              En lisant l'article, j'ai été curieuse de réfléchir aux compétences en littératie médiatique développées par l'éducation au média radio et plus précisément par la création d'une chronique radio par des élèves. D'ailleurs, Pierre Fastrez aborde la radio dans le seul exemple qu'il donne (3.4)

              Tout d'abord, voici les définitions de Pierre Fastrez:
Littératie médiatique : "ensemble des compétences caractérisant l'individu capable d'évoluer de façon critique et créative, autonome et socialisée dans l'environnement médiatique contemporain."
Les compétences mobilisées : "savoir effectuer un certains nombres de tâches (lecture, écriture, navigation, organisation) sur un certain nombre d'objets médiatiques (informationnels, techniques et sociaux)."  Un diaporama datant de 2010 permet de visualiser un schéma des domaines de compétences ainsi que des trois dimensions de la littératie médiatique.

Rappel de la translittératie :  habiletés  de lire, écrire et d’interagir par le biais d'une variété de plateformes, d'outils et de moyens de communication qui sont les médias (l'écriture, l'empreinte, la TV, la radio et le film, aux réseaux sociaux numériques) (Thomas, 2007).

Concrètement, en reprenant les "dimensions" du média d'après Pierre Fastrez, le média radio est : 
  • un objet informationnel : traitement de l'information en fonction des auditeurs ciblés
  • issu d'un processus de productions techniques : enregistrement, montage, traitement du son, diffusion
  • un objet social : la radio a pour objectif d'informer des auditeurs, un rôle de communication sociale de proximité ainsi que de démocratisation de la culture.

Selon Pierre Fastrez, l'élève va mobiliser des compétences dans quatre domaines : 
  • lire
  • écrire
  • naviguer
  • organiser

J'ai imaginé un projet simple de création de chronique radio par des élèves, allant de la recherche d'informations jusqu'à l'enregistrement du fichier MP3 sur le disque dur.
  • recherche d'informations (naviguer)
  • écriture de l'article (écrire) : la chronique étant un article lu à voix haute
  • écoute d'une chronique radio pour en comprendre les codes (lire)
  • écriture pour l'oral (écrire)
  • lecture à voix haute (lire)
  • enregistrement sonore (écrire)
  • montage (organiser et lire. J'ai écrit "savoir lire un signal sonore" car monter avec un logiciel sonore, c'est de la lecture, qu'elle soit visuelle ou auditive. De plus, il n'est pas toujours nécessaire d'entendre le son pour le repérer, il suffit de regarder (lire) les amplitudes de modulation du signal pour voir où sont les respirations, silences ... )
  • enregistrement de la piste sonore en MP3 (écrire)
Tableau de compétences en littératie médiatique mobilisées selon les dimensions du média radio :
(Ceci étant mon premier tableau selon P.Fastrez, il y a peut-être des erreurs. De plus, cet article ainsi que le tableau ont été rédigés dans des conditions extrêmes avec un enfant de 3 ans qui maîtrisent ses cordes vocales à la perfection ! )

              Je constate que les quatre domaines de compétences en littératie médiatique sont développées et/ou mobilisées, et ceci pour les trois objets que peut être la radio.
        Ces compétences en littératie médiatique mobilisées pour ce type de projet sont également transférables lors de pratiques d'autres médias (translittératie) ainsi que dans la vie courante, soit en tant qu'élève (milieu scolaire) soit en tant que citoyen vivant et participant à la vie de la Cité :
(j'inclus les réseaux sociaux dans les médias en ligne)


             J'étais curieuse du résultat car l'éducation au média radio est souvent "boudé".  Par ces deux tableaux, elle me semble complète (est-ce le bon terme ?) et surtout utile aux futurs citoyens que seront les élèves. Je le découvre à la fois étonnée et emballée.
Savoir s'exprimer à l'oral, savoir adapter son discours à la personne qui écoute, savoir produire une information exhaustive qui répond à un besoin spécifique, sont des compétences utiles tout au long de la vie et qui sortent du cadre scolaire. 

Cela semble tellement évident, finalement.

Si vous souhaitez avoir un autre exemple de réflexion sur les compétences en littératie médiatique mobilisées lors de la pratique d'un autre média,  voici un article à lire de LN Mulot Etude d'un agrégateur comme objet de litteratie médiatique.
Elle propose une réflexion sur les tâches médiatiques  liées  à la pratique de l'agrégateur Google Actualités. Cet article est également paru sur Médiadoc n°9 de décembre 2012.  Sa réflexion a été un appui important pour la création de ce billet.

02/02/2013

Produire des podcasts : information literacy, transliteracy, digital literacy

   Le podcast est une production permettant de communiquer oralement le résultat de recherches d’information menées, au même titre que pour la création d’un diaporama, d’un exposé … Il s’agit de s’informer pour informer.
Le travail de préparation nécessite de :
  • rechercher l’information : il ne peut y avoir d’improvisation
  • hiérarchiser ses informations, les résumer
  • reformuler : le copié-collé n’est pas possible car il s’entend à l’oral.
  • utiliser les codes de l’oral pour rédiger : les phrases doivent être courtes pour ne pas s’étouffer lors de la lecture, la ponctuation doit être utilisée afin de marquer les respirations et les arrêts.
  • S’exprimer à voix haute : l’élève doit apprendre à parler fort, à lire pour les autres et non pour lui, à articuler et à maîtriser son débit et sa voix. Le respect de la ponctuation, la respiration vont l’aider à mettre le ton afin que la lecture ne soit pas monotone.

On se trouve devant un outil formidable qui permet de former les élèves à un usage critique de l’information et à une maîtrise des technologies de l’information.
La maîtrise de l’information est également désignée par « Information Literacy ». Pour Mérinda Mc Lure, il s’agit d’un ensemble d’habiletés de résolution d’un problème d’information avec les habiletés d’information, en noyau central et quatre aux habiletés à maîtriser :
  • habiletés de lecture, écriture et calcul (alphabétisation)
  • habiletés de base pour l’utilisation d’un ordinateur
  • habiletés de base pour la compréhension des médias
  • habiletés de base pour l’utilisation des réseaux

Au-delà de la résolution de problème d’information, l’élève va acquérir d’autres habiletés grâce à l’utilisation ou la création de podcasts comme celles « d’interagir par le biais d'une variété de plateformes, d'outils et de moyens de communication qui sont les médias (l'écriture, l'empreinte, la TV, la radio et le film, aux réseaux sociaux numériques) » (Thomas, 2007). Il s’agit alors de la « Transliteracy ».
On peut également considérer que le podcast (écoute et création par l’élève en autonomie) peut lui permettre d’acquérir la compétence « digital literacy » qui regroupe trois capacités :
  • la capacité de se servir d'une façon efficace d'un ordinateur et de l'internet, la compréhension de leur fonctionnement
  • la capacité de trouver l'information, la comprendre dans son contexte de façon critique, saisir l'importance de certaines éléments comme le régime de propriété, les intérêts commerciaux en jeu, la présence éventuelle de censure, les tentatives de propagande 
  • la capacité de créer et de diffuser des messages sur différents médias, de comprendre et d'utiliser les forces et les limitations de chacun d'entre eux, de s'en servir de façon autonome et indépendante.
De plus, selon la commission européenne : « la digitale literacy devient vite une des conditions de la créativité, l'innovation et l'esprit d'entreprise. Sans elle, les citoyens ne
peuvent ni pleinement participer dans la société, ni acquérir les compétences et les connaissances nécessaires pour vivre au 21ème siècle » (European Commission, Directorate-General for Education and Culture, Elearning: Better eLearning for Europe, Luxembourg. Office for Official Publications of the European Communities, 2003. Cité par Olivier Le Deuff dans son article « la culture de l'information : quelles « littératies » pour quelles conceptions de l'information? », VI Colloque ISKO-France 2007, 7 et 8 juin 2007, IUT de l'Université Paul Sabatier, Toulouse.)